jeudi 13 juillet 2017

Conseil de Collège du 13 juin 2017

Ce mardi 13 juin 2017 nous a offert l’opportunité de passer une journée ensoleillée dans les merveilleux locaux de l’Université pour le conseil de collège, dans une atmosphère de dialogue et d’échange. Nous ne nous en cachons pas, nous nous sommes délectés de cet intermède démocratique, qui nous a beaucoup plus apporté que de se prélasser sur un transat en attendant l’été.

(sic)

Acte I

La séance s’ouvre sur le délicieux sujet des Ecoles Universitaires de Recherche en économie et en droit (et chacun la sienne, cela va de soi). Elles seraient accessibles à partir d’un Bac +4 à une soixantaine d’étudiants par an qui souhaiteraient ajouter une thèse à leur pedigree, plus « professionnalisante », selon les porteurs du projet, que le doctorat classique. L’admission se ferait sur « critères académiques » tant obscurs qu’imprécis. 
Le but, nous rassure-t-on, n’est certainement pas d’accaparer les contrats doctoraux du parcours classique, mais au contraire de pallier l’ultra-spécialisation dont souffrirait l’Université. Elles seraient financées en partie par l’IdEx (qui renflouerait les moyens des labos) et de bons samaritains privés qui trouveraient leurs intérêts dans les sujets de « recherche » – ou de « rhétorique », c’est selon votre conception de la discipline.

Quel intérêt ? Nous vous voyons venir, grands curieux ! 
En tout premier lieu, dégainer la carte prestige des facultés pour rivaliser avec les universités voisines (Toulouse pour l’économie notamment). Mais aussi redorer le blason de nos formations et leur offrir une plus grande valeur sur le marché du travail. 
En d’autres termes, pour ceux qui ne sont pas dans les tuyaux, renforcer la formation à deux vitesses. Sceptiques ? N’oublions pas l’exemple de l’IEP, autrefois nos collègues, aujourd’hui nos concurrents. 
A l’heure de la loi sur la sélection en master, l’idée est évidemment malvenue. Mais n’ayez crainte, la question n'a pas soulevé de problème autour de la table. Quelques-uns se sont tout de même inquiétés pour la rémunération supplémentaire des enseignants et Sieur Grard, notre cher directeur de collège, s’est félicité d’y trouver un argument pour empêcher de nouveaux gels de postes (s’il en fallait un de plus…).

Seuls vos fidèles serviteurs et leurs voisins de table étudiants se sont posé la question de la soutenabilité administrative et des conséquences d’une telle mise en concurrence des étudiants. Nous nous sommes même risqués à proposer d’innover dans les parcours ordinaires plutôt que de les délaisser au profit de nouveaux parcours sélectifs. 
Nous n’avons visiblement pas fait l’unanimité ; nous nous sommes même vus répondre que c’est « le sens de l’histoire ». Rassurons-nous tout de même : le projet prévoit 2 postes d’administratifs à temps complet supplémentaires pour chaque école universitaire, dont le financement serait attribué par un concours que nous sommes apparemment très peu sûrs de gagner. Qu’à cela ne tienne : le projet est adopté à la majorité à 5 voix contre. 
Et après investigation, nous pouvons affirmer que les financements seront bel et bien attribués.

Acte II

Vient ensuite la question épineuse de la sélection en master. Tout impatients que nous sommes, nous nous étonnons rapidement d’être les seuls si informés (et furieux) sur la question. La direction nous présente d’abord des chiffres, royalement incomplets, qui ne font pas frémir le moindre poil sur le crâne de nos éminents sages. 
Sieur Grard prend la parole le premier pour invectiver vos fidèles serviteurs et les accuser d’avoir sciemment manqué à la procédure en interpellant la présidence de l’université avant lui. Tout vexé qu’il est, il élève sa voix de patriarche pour nous remettre à notre place devant sa compagnie. Lui rétorquer notre souci d’efficacité ne sert à rien. 
Bien, nous nous sommes fait gronder comme des enfants, voilà qui annonce un heureux débat démocratique.

L’ensemble de l’équipe dirigeante se défend alors d’avoir fait circuler de mauvaises informations – ce que l’un de vos serviteurs présent en amphi pourra authentiquement discréditer. 
Nos seigneurs admettent tout de même que les moyennes faibles au semestre 5 et les vœux 4 et 5 n’ont systématiquement pas été étudiés par la faculté d’économie, arguant la saturation des capacités d’accueil. Quand nous leur demandons pourquoi le choix a été fait d’intégrer 45% de candidats extérieurs au détriment des étudiants de l’UB, nous n’obtenons que silence et haussements de sourcils agacés. 
Puis Sieur Blancheton, directeur de la faculté d’économie, annonce assumer collectivement cette décision (prosopopée !), précisant que les étudiants recalés pourront toujours aller à la Rochelle (dont nous savons que les capacités sont déjà remplies), avant de se désengager auprès du recteur, qui doit, à son avis, faire aussi sa part de besogne. 
Finalement Sieur Grard clôt le débat en nous accusant de vouloir mettre en place une discrimination positive scandaleuse à l’égard des étudiants bordelais. 
Les hostilités sont lancées à vive allure sur la pente de la mauvaise foi. Sieur Herbach, directeur de l’IAE, saisit l’occasion pour lâcher un trait d’esprit : les étudiants recalés ne sont malheureusement que des « boulettes ». Le mépris est à son paroxysme.

La causerie dévie ensuite sur la sélection prévue l’année prochaine, sans tenter de trouver de nouvelles solutions pour cette année. Les consignes de la présidence demandant l’admission immédiate de tous les étudiants ayant une moyenne égale ou supérieure à 11,5 sont déjà une trop grosse concession, il est hors de question d’accorder la moindre nouvelle faveur au fief ennemi. On nous rappelle d’ailleurs que cette barre de 11,5 ne doit pas être communiquée, car elle ne sera pas reconduite l’année prochaine. 
L’ergotage s’étend finalement en longues élucubrations sur ce qu’il aurait été intelligent de faire (fixer les modalités de sélection, informer sur l’ordre des vœux, réorganiser le calendrier d’admission par exemple ?) pour venir s’écraser pathétiquement sur la solution miracle de la césure, rappelée par Dame Bertin. Décidément, tout est bon pour bouter nos étudiants hors de nos facs ! 
Dans notre désarroi, nous ne sommes malheureusement pas surpris par le désintérêt et l’incompétence chronique de nos interlocuteurs, avouant eux-mêmes avoir sous-estimé l’attractivité de l’université de Bordeaux. Pour eux, les étudiants ne sont que des stats et notre colère puérile.

Acte III

Mais nous ne sommes pas encore au bout de nos surprises ! Le département des langues nous annonce une nouvelle suppression des heures de TD d’anglais (qui avaient déjà fortement diminué en début d’année). Nous noterons le cas particulier offert à l’anglais dont échappent, heureusement mais pour de mauvaises raisons, l’allemand et l’espagnol. Désormais, nos licences ne bénéficieront plus que de 7h30 de TD en présentiel, accompagnées d’environ 7h30 de travaux en ligne, pour des classes se limitant à une vingtaine d’étudiants. 
L’idée est de construire un cours sur la plateforme Moodle qui devra être travaillé en amont et restitué en TD pour favoriser l’oral. Le concept de pédagogie inversée est évidemment défendu depuis des années par vos serviteurs et l’idée de proposer un socle de compétences harmonisé et une évaluation finale commune est séduisante. Cependant nous sommes sceptiques sur les dispositifs du projet. La dématérialisation sur Moodle existe depuis longtemps et les enseignants ont déjà les moyens de proposer leur cours en amont (ce que certains font, d’ailleurs) : quel intérêt de supprimer du présentiel ? 
Concernant la répartition des étudiants à 20 par TD, la promesse avait déjà été formulée lors de la refonte des maquettes l’année dernière et n’a en aucun cas été tenue, comment pourrait-elle l’être pour cette année ? 
Aucun engagement sur l’ouverture de postes supplémentaires n’est formulé. Les échanges montent dans les tours, Sieur Diallo, enseignant en langues, écope du même sermon infantilisant que nous-mêmes une heure plus tôt, puis les exercices de vocalise sont coupés secs par le grand chef d’orchestre. La mesure est adoptée à la majorité (5 voix contre, 2 abstentions).


A ceux qui pensent encore que l’université va bien : l’apathique est toujours coupable de son ignorance.