lundi 6 mai 2013

Les révolutionnaires virtuels en Asie


Voici un petit article relatant un projet sur la blogosphère contestataire à travers le monde, que OSBIV soutient depuis maintenant un an. En perspective plusieurs actions sur BIV l'an prochain à ce sujet. Bonne lecture !


L’article qui suit est la conclusion de notre travail documentaire sur les révolutionnaires virtuels en Asie. Il s’apparente à un premier bilan de notre expérience sur ce sujet. Quatre mois et douze jours d’interviews, de recherches documentaires, de rencontres et d'échanges. Quatre mois et douze jours ou la première partie de notre périple. Quatre mois et douze jours que nous n'oublierons certainement jamais…  

L’Asie. Un continent vaste, des cultures diverses. L’empire du soleil levant s’est en effet construit via la migration d’une pluralité d’ethnies. Le Laos par exemple compte ainsi plus de cent cinquante minorités. A l’instar du Cambodge et du Vietnam qui en rassemblent respectivement autour de cinquante. Des langues, des croyances et des rites différents; une richesse incroyable difficile a amalgamer. L’histoire participe à cette diversité. D’abord parce qu’elle a favorise les flux migratoires. Aussi car elle a été le témoin de conflits profondément marquants, influents sur le comportement actuel de la population. L'indépendance de l’Inde, la guerre du Vietnam, le génocide khmer résonnent toujours dans chacun des états. Une histoire relativement récente qui contribue au caractère différent de ses habitants. Pourtant les luttes de cette nouvelle génération de blogueurs sont similaires. C’est l’expression développée qui diffère ; comme un miroir de cette diversité culturelle. Blogueur Sans Frontiere écrit : « la corruption, le népotisme, les dérives d’un pouvoir non démocratique sont régulièrement dénoncés par les blogueurs ». En Inde, la corruption est ainsi le problème majeur décrit par les internautes locaux. Non qu’elle soit inexistante dans le reste du territoire asiatique ; mais parce que l’Inde reste la seule réelle démocratie des pays en voie de développement du continent. Elle s’ouvre donc à une autre possibilité d’expression qui décide de se tourner vers ce fléau commun. Parallèlement les régimes autoritaires et dictatoriaux influent aussi sur l’expression du « blogging ». Au Laos, le gouvernement endoctrine et entretient la population dans une ignorance étrange. Une peur de l'éducation qui se transmet ; la croyance d’un esprit qui s'échauffe au contact d’une trop grande culture. Les bases d’une cyber révolte sont ainsi avortées. Au Vietnam, les armes du parti sont moins grégaires. La révolte existe mais l'éducation est contrôlée. Dans l’un des douze pays « Ennemis d’Internet » (RSF), la censure est omniprésente et terrifie ses habitants (suivant le modèle de sa grande sœur la Chine). Ainsi, l'année précédente, cinq blogueurs ont été arrêtés et risquent jusqu’à vingt ans de prison pour « propagande contre la république socialiste du Vietnam ». Parce que le gouvernement bafoue un droit humain inaliénable, il motive ses habitants à réagir. La population utilise des formules détournées sur un cyber espace ultra contrôle. Un autre moyen d’expression ; un moyen d'éviter le système pour exprimer les problèmes actuels lies a la pauvreté, aux écarts de richesse ou à l'éducation. Le poids de ces révélations est de plus en plus important à l'échelle planétaire, l’Asie s’affirmant comme le nouveau centre économique naissant.
A l’aube du XXI e siècle, la situation géopolitique mondiale prend un tournant majeur. L'hégémonie américaine est affaiblie laissant place à une nouvelle configuration tournée vers l’Asie Orientale. Un décentrage du monde de l’Atlantique vers le Pacifique. La cartographie traditionnelle est donc à revoir. L’Asie se présente comme un nouveau moteur de croissance. Non sans conséquence : une amélioration moyenne donc relative du niveau de vie. La société asiatique va pouvoir s’ouvrir, s’ouvrir notamment aux nouvelles technologies tel qu’Internet. En découle, l’apparition de cyber-dissidents. A contrario, ces « révolutionnaires virtuels » ont aussi un impact positif sur cette société prônant son amélioration constante ; une relation de réciprocité entre dynamisme politico économique et blogueurs. Aujourd'hui, l’Asie compte plus de  cent cinquante trois millions d’utilisateurs Facebook, une augmentation significative d´environ quarante cinq pourcent par rapport à l'année dernière. L’effet domino est un des responsables de ce boom; une sorte de mimétisme des pays moins développés sur des pays voisins tels que Singapour, la Corée du Sud ou encore le Japon. Aussi, une coopération et une solidarité forte parmi ces activistes du net est à prendre en compte. Ils représentent à eux seuls une véritable communauté. Cette volonté de partages et d'échanges se reflètent au travers d'événements organises a une échelle continentale. BlogfestAsia, festival réunissant depuis quelques années les blogueurs d’une quinzaine de pays d’Asie, en est l’exemple flagrant. A cette occasion, il est possible d’observer une hiérarchie au sein de ces blogueurs, certains ayant des voix plus légitimes que d’autres. Ces différences internes s’effacent  néanmoins au profit d’une caractéristique commune : les blogueurs, des jeunes éduqués souvent issue d’un milieu favorisé. L'accès à Internet semble alors réservé à une certaine classe. Les règles ne changent pas, une révolution passe le plus souvent par une élite en éveil. Internet et les blogs sont leurs nouvelles armes d’action.

La liberté d’expression demeure ainsi un droit fondamental, objet de lutte pour certains blogueurs asiatiques. Paradoxalement une généralisation théorique peut aussi apparaitre comme un ethnocentrisme occidental. « Certains enfants en Asie doivent choisir entre payer le bus pour aller à l'école et manger le midi » nous disait Hanny Kusumawati, fondatrice d’un mouvement sociale promouvant l’éducation des enfants indonésiens (http://coinachance.wordpress.com/). L'idée que la globalisation se traduit par une exportation de la démocratie s’affirme alors comme utopique. Il est en effet difficile de choisir une lutte de l’esprit quand les besoins fondamentaux de l’Homme ne sont pas assouvis. Une hiérarchisation naturelle s’impose alors.  

Morgane Dumas
Pauline Soubie Ninet

lien vers leur blog : http://lesrevolutionnairesvirtuels.tumblr.com/

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